Deux types de parcours :

1. L'éducation interculturelle formelle

L'éducation interculturelle formelle inclut les programmes et les initiatives scolaires développés au sein et par l'école.

L'école est, après la famille, un agent majeur de socialisation, par le biais duquel les enfants non seulement reçoivent une éducation scolaire, mais aussi apprennent leur code culturel. Ce code culturel doit offrir une ouverture sur les autres cultures, les autres religions et les autres modes de vie. Par conséquent, sans le soutien actif de l'école, les efforts déployés pour introduire une éducation interculturelle seront peu fructueux, si ce n'est voués à l'échec total. C'est la raison pour laquelle nous incluons ici quelques réflexions sur cet aspect de la question, même si ce kit pédagogique est conçu essentiellement pour un emploi dans un cadre pédagogique informel.

L'éducation interculturelle exige de l'école un effort important de renouvellement et d'ouverture, mais aussi d'adaptation des programmes aux réalités des sociétés multiculturelles. De plus en plus, l'école base son travail sur le principe de l'égalité de tous. A présent, l'éducation interculturelle lui demande aussi de reconnaître et de respecter les différences entre les individus.

D'une manière générale, l'école devrait faire des efforts pour :

• Tenter de créer des opportunités sociales et éducatives égales pour les enfants des groupes culturels minoritaires ;

• provoquer une prise de conscience des différences culturelles comme moyen de lutte contre la discrimination ;

• défendre et développer le pluralisme culturel dans la société ;

• aider les enfants à gérer les conflits de manière constructive, en mettant en lumière les intérêts divergents et en recherchant les objectifs communs.

Le rôle de l'école en tant qu'agent d'éducation interculturelle est double : en direction des cultures et des groupes minoritaires, et en direction des cultures et des groupes majoritaires.

En direction des cultures et des groupes minoritaires

L'école joue un rôle irremplaçable dans l'accueil, la socialisation et l'inclusion des enfants des groupes minoritaires.

Dans ce cas, l'éducation interculturelle devrait développer des programmes pour répondre aux besoins fondamentaux des groupes minoritaires, à savoir gagner la reconnaissance de la société.

Ces programmes trouvent leur fondement dans la culture dominante, mais sont ouverts aux changements. Ils devraient permettre aux enfants de comprendre progressivement le code culturel de la société dominante, mais aussi d'acquérir les aptitudes et les moyens nécessaires à leur autonomie et à leur confiance au sein de cette société.

Ce dernier aspect devrait inclure les points suivants :

• La connaissance de votre environnement et des relations humaines qui le régissent ;

• la compréhension de l'idée de temps propre à chaque culture ;

• la compréhension des relations économiques, notamment celles dont dépendent l'emploi et la survie des individus ;

• la connaissance de votre environnement proche et des associations hors cadre scolaire susceptibles de vous être utiles ;

• la compréhension des rouages du système politique et des façons de les exploiter.

En direction des cultures et des groupes majoritaires

Les enfants et les jeunes des groupes majoritaires doivent apprendre à vivre avec les autres de manière positive et créative.

Il est par conséquent nécessaire d'introduire dans le programme scolaire des éléments interculturels basés sur :

• Le rejet de l'approche ethnocentrique de la culture, ou de l'idée selon laquelle il est possible de définir une hiérarchie des cultures ;

• la prise en considération - en toute objectivité et respect - des caractéristiques des diverses cultures cohabitant dans un espace spécifique ;

• l'ouverture de la vision du monde chez les écoliers ; cet aspect est particulièrement important là où les minorités sont peu nombreuses.

Et l'école ?

Au même moment, il est clair que l'école doit repenser sa propre position. Trop souvent, elle transmet et renforce les stéréotypes négatifs au sujet d'autres groupes et cultures. Il faut instaurer une communication constructive entre tous les acteurs du processus éducatif à propos du rôle de l'école : les enseignants, les enfants, les parents, les administrateurs, les pouvoirs locaux et les institutions. Diverses mesures structurelles d'envergure s'imposent, si l'on veut que l'éducation interculturelle fonctionne dans et hors de la salle de classe. La bonne volonté ne suffit pas ; il faut agir. On peut citer beaucoup d'exemples de «bonnes pratiques» en Europe. Voici deux recommandations :

• L'éducation interculturelle doit être un des aspects-clés de la formation de tous les enseignants. Afin que celle-ci ait un impact réel et personnalisé sur les enseignants, il faudrait leur donner le temps de travailler dans une autre culture, avec les moyens de comprendre ce qui se passe à l'intérieur d'eux-mêmes - ainsi, ils seraient mieux préparés pour aider leurs élèves à pratiquer la tolérance active.

• Les manuels et autres outils pédagogiques devraient être revus sur la base d'autres références, afin que les écoliers puissent apprendre à trouver «normaux» d'autres points de vue et perspectives - Comment la Bataille de Waterloo est-elle racontée dans les livres d'histoire des différents pays ? Quel pays ou quelle région du monde trouve-t-on au centre des cartes utilisées pour les leçons de géographie ?

Les difficultés inhérentes à la mise en oeuvre de tels changements dans les systèmes scolaires sont énormes, mais les bénéfices qui pourraient en être retirés le sont tout autant. Le but ici n'est pas d'aller plus loin dans cette argumentation. Si vous désirez en savoir davantage, reportez-vous au livre d'Antonio Perotti, «Plaidoyer pour l'interculturel», qui rend compte brillamment de l'expérience développée en la matière par le Conseil de l'Europe en coopération avec des pédagogues au cours des années 1990. Consultez également le chapitre 5 de Repères et sa partie sur l'Education.

2. L'éducation interculturelle informelle

Les objectifs de l'éducation interculturelle informelle coïncident avec ceux de l'éducation interculturelle formelle. Les différences entre ces deux «parcours» se situent essentiellement au niveau des intervenants et des méthodes de travail. Selon les traditions éducatives et politiques auxquelles vous vous identifiez, vous préférerez peut-être désigner ces processus d'éducation informelle par le terme «d'apprentissage interculturel». Cette remarque est importante, car elle fait référence à l'un des principes directeurs de notre approche dans ce kit. Nous considérons les jeunes en tant qu'acteurs de leur propre apprentissage ; ce sont eux qui découvrent comment donner un sens au monde qui les entoure et qui conçoivent des stratégies pour y vivre pacifiquement.

Les éducateurs informels travaillent avec les jeunes dans les centres de jeunes, les organisations et les mouvements de jeunesse, les centres d'information et d'orientation de jeunesse, les activités de loisirs extrascolaires ; dans les rues ; dans le cadre des échanges internationaux de jeunes ; dans les foyers pour les jeunes et les jeunes chômeurs ; dans toute la sphère géographique et socio-économique de l'Europe. Beaucoup d'entre eux sont des volontaires qui choisissent de consacrer gratuitement de leur temps à ce travail qui leur tient à coeur. Même cette liste ne couvre pas tout le spectre des personnes engagées dans l'organisation d'activités de jeunesse informelles. En réalité, les acteurs les plus efficaces de ce processus sont les jeunes eux-mêmes, lorsqu'ils prennent en charge l'éducation de leurs pairs (cette approche, connue sous le nom d'éducation par groupes de pairs, est traitée plus spécifiquement dans DOmino, publication également produite dans le cadre de la Campagne «Tous différents - Tous égaux».) Toutes ces situations et d'autres encore offrent le contexte nécessaire au processus d'éducation interculturelle informelle.

L'éducation informelle possède plusieurs caractéristiques importantes qui la distinguent de l'éducation formelle :

• L'éducation informelle est facultative, elle ne possède pas le caractère obligatoire de l'école qui amène parfois les élèves à rejeter les approches ou les sujets inscrits au programme.

• Dans le domaine de l'éducation informelle, les intervenants doivent faire des efforts plus importants pour éveiller l'intérêt des participants, car le secteur commercial sait très intelligemment proposer des alternatives séduisantes.

• L'éducation informelle favorise des relations plus étroites avec les participants, ce qui facilite la communication (et ajoute aussi quelquefois au stress !).

• Les contenus sont adaptés en coopération avec les participants à leurs besoins et leurs réalités spécifiques.

• Il y a une plus grande liberté au niveau du choix des objectifs et des activités permettant de les atteindre.

• La méthodologie active et participative contribue à une plus grande participation.

A maints égards, bien entendu, l'éducation informelle ne pourrait exister sans l'éducation formelle, et il reste beaucoup à faire pour améliorer la compatibilité entre les deux. Vous parviendrez peut-être à adapter certaines activités proposées dans la Partie B à une utilisation scolaire, mais nous nous sommes concentrés sur leur utilisation dans un cadre informel. Dans ce qui suit, nous étudions plus en profondeur les bases de ces activités.

< page précédente