Faire le lien entre les images et leurs
répercussions
Cette réaction de rejet
s'exprime sous forme de phénomènes étroitement
corrélés : discrimination, xénophobie,
intolérance, antisémitisme et racisme. Le
pouvoir est une composante essentielle des relations entre
les cultures (et les subcultures). Ces réactions
sont encore pires lorsque des majorités rencontrent
des minorités. Au fil du temps, les définitions
et l'utilisation que l'on en fait évoluent ;
il serait intéressant pour vous de comparer cette
partie avec le chapitre remarquable que Repères consacre
à la Discrimination et à la Xénophobie
et dans lequel figurent des exemples plus récents.
La discrimination
La discrimination se manifeste
par l'entrée en action des préjugés.
Des groupes sont perçus comme différents et
font l'objet de discrimination. Ils sont mis à l'écart
et jugés criminels par des lois qui rendent leurs
modes de vie illégaux : ils sont contraints
de vivre dans des conditions déplorables, privés
de voix politique, relégués aux pires emplois
ou privés de travail, interdits d'entrée en
discothèque et soumis à des contrôles
de police effectués au hasard.
Pouvez-vous penser à d'autres exemples de discrimination ?
Au sein des groupes minoritaires,
il y a ceux qui se sont battus contre cette discrimination
négative, quelquefois avec le soutien de membres
de la majorité. Ils affirment que pour instaurer
l'égalité, il est nécessaire de promouvoir
des mesures en faveur d'une discrimination positive.
Ces mesures sont aussi désignées par le terme
«d'action positive». Pouvez-vous suggérer
des actions positives nécessaires pour combattre
les formes de discrimination négative citées
ci-dessus ? (Exemple : aménager des aires
d'arrêt adaptées, en consultation avec les
Rom (Tsiganes) et les Sinti, afin de faire en sorte qu'elles
répondent à leurs vrais besoins).
La xénophobie
Le terme de xénophobie
vient d'un mot grec qui signifie «peur de l'étranger».
Vous avez ici un exemple parfait de cercle vicieux :
j'ai peur de ceux qui sont différents parce que je
ne les connais pas, et je ne les connais pas parce que j'ai
peur d'eux. Comme la discrimination et le racisme, la xénophobie
se nourrit des stéréotypes et des préjugés,
bien qu'elle trouve ses origines dans l'insécurité
et la peur projetée sur «l'autre». Cette
peur de l'autre se traduit souvent par le rejet, l'hostilité
ou la violence à l'égard des personnes d'autres
pays ou des membres de minorités.
La xénophobie a été
exploitée par de puissantes élites pour «protéger»
leurs pays des influences extérieures, comme l'illustre
le cas de l'ex-Président Ceaucescu, le dictateur
renversé de Roumanie, qui aimait citer le poète
Mihai Eminescu :
«He who takes strangers to heart
May the dogs eat his parts
May the waste eat his home
May ill-fame eat his name !»
(Que celui qui porte les étranger
dans son coeur
soit dévoré par les chiens,
que sa maison aille à sa perte,
que son nom soit sali)
La xénophilie est l'amour des étrangers. Pouvez-vous
modifier ce poème de manière à ce qu'il
reflète ce sentiment ?
L'intolérance
L'intolérance est le manque
de respect pour des pratiques et des croyances autres que
les siennes. Elle se manifeste lorsque quelqu'un refuse
de laisser les autres agir de manière différente
ou défendre des opinions différentes. L'intolérance
peut se traduire par le rejet ou l'exclusion de personnes
à cause de leurs croyances religieuses, de leur sexualité,
ou même de leur tenue vestimentaire ou encore de leur
coupe de cheveux.
A votre avis, quand est-il bien d'être intolérant ?
L'antisémitisme
La combinaison du pouvoir, des
préjugés, de la xénophobie et de l'intolérance
à l'égard des juifs est connue sous le nom
d'antisémitisme. Cette forme d'intolérance
religieuse conduit à la discrimination d'individus
et à la persécution des juifs en tant que
groupe. La plus horrible manifestation de l'antisémitisme
a vu le jour avec la montée d'Hitler au pouvoir et
l'idéologie nazie de pureté raciale. Six millions
de juifs sont morts dans des camps de concentration pendant
l'Holocauste ou la Shoah. Et, chose effrayante, des «historiens»
comme David Irving ont tenté de «prouver»
que les camps de concentration n'avaient pas existé
ou qu'ils n'étaient pas aussi terribles qu'on l'avait
prétendu.
Qu'avez-vous appris à propos de la Shoah à
l'école ? Quelles formes d'antisémitisme
trouve-t-on aujourd'hui ?
Le racisme
Quand avez-vous employé ou entendu quelqu'un employer
l'expression de «raciste !» ?
Les conséquences du racisme
sont terrifiantes, le mot lui-même est effrayant.
Définir le «racisme» n'est pas facile.
Le définir de sorte qu'il soit possible de déterminer
- dans toute l'Europe - si un acte, une pensée ou
un processus spécifique peut être qualifié
de raciste, semble relever de l'impossible.
Le racisme repose sur la combinaison de
croyances selon lesquelles des caractéristiques humaines,
des aptitudes spécifiques, etc. sont déterminées
par la race et qu'il y a des races supérieures et
des races inférieures. Logiquement, pour adhérer
à cet argument, vous devez croire qu'il existe des
races humaines différentes.
Les expressions du racisme évoluent
avec le temps et peuvent même porter des noms différents
dans des lieux différents. C'est le concept de supériorité
qui est le plus dangereux - la supériorité
d'un groupe d'hommes par rapport à un autre. Si nous
commençons à croire en de telles théories,
à des époques et des lieux différents,
alors nous pouvons apporter notre soutien tacite aux thèses
et actes suivants :
• Le massacre de 400 000 Rom ou
Tsiganes sous le régime nazi ;
• le massacre et la destruction
de communautés entières dans l'ex-Yougoslavie,
sous le prétexte de «l'épuration ethnique» ;
• la réservation de certains
emplois et services à certains groupes de la société ;
• "L'Europe aux Européens»,
«La France aux Français», «La Russie
aux Russes», etc.
• "L'Algérie est là
pour les Algériens - alors, pourquoi ne rentrent-ils
pas tous chez eux», «La Turquie est là
pour les Turcs - alors, pourquoi ne rentrent-ils pas tous
chez eux», etc.
• l'aide au développement
est un piège plus qu'une aide réelle ;
• l'envoi de lettres piégées
aux organisations qui oeuvrent en faveur des demandeurs
d'asile.
Ce kit pédagogique est basé
sur le rejet absolu de telles théories ou croyances.
L'espèce à laquelle tous les hommes appartiennent
est l'espèce humaine et elle ne comporte qu'une seule
race : la race humaine. Point à la ligne.
Est-ce que vous qualifieriez de racistes toutes ces illustrations
des conséquences de la croyance en la supériorité ?
Si non, que diriez-vous ?
Suivent plusieurs idées et explications
qui approchent le racisme de diverses façons :
Le racisme est un mythe
«Pour de multiples raisons pratiques d'ordre
social, la «race» n'est pas tant un phénomène
biologique d'un mythe social. Le mythe de la «race»
est responsable d'un nombre incalculable de drames humains
et sociaux. Au cours des dernières années,
les hommes lui ont payé un lourd tribut et ont enduré
des souffrances insoupçonnées. Il continue
d'empêcher le développement normal de millions
d'êtres humains et prive la civilisation de la coopération
fructueuse d'esprits féconds.»
« Statement on Race », UNESCO, Paris, juillet
1950
En réponse à la
propagande raciste nazie, Julian Huxley dans «We Europeans»,
en 1935, avait répondu que:
« le racisme était un
mythe, un mythe dangereux, un cloaque pour des objectifs
économiques égoïstes qui, mis à
nu, laissaient entrevoir leur laideur. »
« Il a été convenu
que le racisme pouvait être décrit comme une
discrimination de la part d'un groupe de personnes à
l'encontre d'un autre, sur la base de préjugés
touchant à des caractéristiques physiques.
Il a été souligné que le racisme était
une tentative pour créer de fausses divisions au
sein de la race humaine, divisions sans aucun fondement
scientifique valable ; qu'il n'y avait qu'une race
sur terre : la RACE HUMAINE, et que, même en
utilisant des termes tels «discrimination raciale»,
ou «relations interraciales», nous risquions
de légitimer une partie des fausses hypothèses
avancées par les groupes et les théoriciens
racistes. »
(Mouvement International des Jeunes et des Étudiants
pour les Nations Unies, « La coexistence multiraciale
en Europe », Session d'étude, CEJ, 1983)
Le racisme est une idéologie
« Dans les débats publics, les termes
de «Ausländerfeindlichkeit», ou «Fremdenfeindlichkeit»
(signifiant hostilité à l'égard des
étrangers) sont les plus employés pour parler
de rejet intellectuel ou actif des étrangers - le
terme de «Rassismus» (racisme) par contre n'est
que rarement utilisé. Nous, nous voulons employer
le terme de «racisme», non pas parce qu'il véhicule
la notion d'une accusation morale et politique plus sévère,
mais parce qu'il illustre le concept historique et analytique
le plus clair - en contraste avec d'autres termes - et parce
qu'il résume les contextes et les causes du rejet
et de la haine des étrangers.
Le racisme est une pure construction idéologique,
une «idéologie» car, en réalité
il n'existe pas de «races» au pluriel. Il n'y
a aucune preuve de liens entre les caractéristiques
physiques ou culturelles des individus et leurs qualités
ou aptitudes fondamentales. L'acceptation du terme de «races»
repose sur une motivation idéologique et des racines
profondément enfouies dans la culture, et remplit
des fonctions importantes pour la protection des structures
dominantes en place :
• Le racisme permet que les inégalités
sociales, l'exclusion et les contradictions de classe soient
perçues comme «naturelles» et non liées
à des facteurs sociaux. L'inégalité
sociale et l'oppression s'en trouvent de ce fait politiquement
et culturellement légitimées, voire ressenties
comme inéluctables par leurs victimes.
• Ces groupes définis
par le biais de «caractéristiques raciales»
peuvent être désignés comme étant
la cause supposée de la crise économique et
sociale. Ils jouent le rôle de boucs émissaires,
détournant l'attention des causes réelles
de la crise et attirant le mécontentement de la société.
Le «néo-racisme»
n'est plus fondé principalement sur les caractéristiques
physiques, mais sur les différences culturelles.
Les affirmations sur le thème de la supériorité
sont en partie oubliées mais, par contre, il est
«simplement» mis en avant que la culture d'un
peuple («Volk») ou d'une nation est nécessaire
à son identité et que le mélange culturel
ou social risquerait de mettre en péril cette précieuse
identité. »
(Jusos in der SPD, "Asyl statt Abschreckung",
Argumente 5, Bonn, 1992)
Le racisme est profondément ancré
dans l'histoire
« Il est important de faire la différence
entre les diverses manifestations du racisme selon les pays.
Des pays tels que le Royaume-Uni, la France et la Belgique
- c'est-à-dire des nations impérialistes avec
des antécédents colonialistes - souscrivent
à des idéologies racistes évidemment
liées à l'exploitation et à l'assujettissement
des Noirs pour la cause du progrès du capitalisme
occidental. Des anthropologues et des biologistes, suivis
plus tard par des socio-biologistes, ont suggéré
des raisons et des explications scientifiques justifiant
le fait de traiter les Noirs comme une sous-espèce
humaine. Certains avançaient et croyaient que les
individus d'une couleur particulière possédaient
des caractéristiques génétiques et
sociales déterminées et immuables, et qu'ils
ne subissaient pas l'influence de l'éducation ou
de l'environnement. Ces hypothèses ont conduit à
la croyance largement répandue selon laquelle les
peuples d'Afrique étaient inférieurs à
la race blanche «caucasienne» tant moralement,
que socialement et intellectuellement, et que par conséquent
nos valeurs humaines n'étaient pas valables pour
eux. Ils pouvaient être traités comme des esclaves,
comme des biens personnels, comme des objets de propriété,
c'est-à-dire de la même façon que du
bétail ou des chevaux que l'on exploite pour produire
des richesses. »
(Confédération Européenne des
Organisations des Centres de Jeunes, «Le racisme en
Europe - Un enjeu pour le travail de jeunesse», Session
d'étude, CEJ, octobre 1989)
Le racisme peut changer
« Le racisme est différent de la haine,
de la discrimination ou des préjugés raciaux.
Le RACISME implique le fait d'avoir le pouvoir de mettre
en oeuvre des pratiques discriminatoires systématiques
par l'intermédiaire des grandes institutions de notre
société. Les préjugés, par contre,
sont les opinions ou les sentiments négatifs préconçus,
sans connaissance, sans réflexion ou sans raison.
Racisme = Pouvoir + Préjugé
Le racisme est à la fois direct et indirect.
Il s'exprime sous deux formes étroitement liées :
le RACISME individuel et le RACISME institutionnel.
La première forme de racisme se manifeste au
travers d'actes directs perpétrés par des
individus et susceptibles de se solder par la mort, des
blessures ou la destruction violente de la propriété.
La deuxième forme est moins évidente. Les
exemples les plus remarquables se trouvent dans les critères
de logement, la ségrégation dans les écoles
et les églises, les mesures discriminatoires en matière
d'emploi et de promotion, mais aussi dans les manuels qui
passent sous silence le rôle de nombreuses minorités
ethniques.
Le RACISME doit aussi être considéré
d'un point de vue culturel. Le RACISME culturel se traduit
par le fait d'user du pouvoir pour perpétuer notre
patrimoine culturel et l'imposer aux autres, tout en détruisant
leur culture, nous comportant ainsi de manière ethnocentrique.
La tendance qui consiste à déconsidérer
les autres cultures, et qui se traduit par un sens inhérent
de supériorité, s'appelle l'ETHNOCENTRISME.
Racisme culturel = Pouvoir + Ethnocentrisme
»
(Fédération Internationale de la Jeunesse
Libérale et Radicale, «Donnez-vous la main :
L'IFLRY contre le racisme et la xénophobie»,
1986)
Que pensez-vous maintenant ?
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