III. Developper un programme pedagogique interculturel

Il est important de garder présent à l'esprit le fait que la réalité diffère sensiblement au niveau européen, tant au sein même des pays qu'entre les pays. Nous vous recommandons par conséquent, à vous animateur de ces activités, d'adapter ces activités à la situation propre à votre pays, région ou ville. Si les exemples donnés ou les questions suggérées pour le compte rendu ou l'évaluation ne conviennent pas au contexte social et culturel de votre groupe, vous devrez alors trouver des exemples ou des questions plus adaptées.

Très peu d'activités peuvent être utilisées directement pour tous les pays ou tous les groupes. Outre les spécificités linguistiques, les différences culturelles et sociales de chaque groupe ou encore le degré de connaissance des thèmes étudiés vous obligeront à toujours adapter les idées suggérées dans ce kit à votre propre situation. Comme nous l'avons précédemment mentionné, le succès de notre approche pédagogique repose sur l'utilisation des expériences, des sentiments, des comportements, des compétences et des connaissances des participants.

Ne vous inquiétez pas ! Vous serez rarement obligé de modifier l'activité dans son ensemble ! La plupart du temps, il vous suffira d'adapter l'évaluation et la discussion à la situation spécifique du groupe et à l'objectif de la campagne. Par exemple, si vous envisagez d'aborder la question de la tolérance religieuse, vous devrez, dans certains pays, orienter de préférence la discussion sur les relations entre cultures musulmane et chrétienne. Dans d'autres pays, il sera plus opportun de parler de l'antisémitisme ou des relations entre catholiques et orthodoxes. Étant donné que les problèmes abordés par la campagne concernent tous les pays, bien que sous des formes différentes, les efforts d'adaptation de l'activité devront en premier lieu tendre vers un rapprochement de ces problèmes de la situation propre des participants. Les «conseils pour l'animateur» fournissent quelques idées et aides pour procéder à cette adaptation, tant au niveau des méthodes que des thèmes.

Conseils pour l'animateur

En travaillant avec des jeunes, vous devez toujours veiller à préserver l'équilibre entre vos objectifs liés à l'éducation interculturelle, et ceux liés au développement du groupe lui-même. L'une de vos principales tâches, en tant qu'animateur, consiste à renforcer et à promouvoir une bonne ambiance entre les membres du groupe et, autant que possible, à stimuler et à encourager leur créativité et leurs aspirations. Cela aidera les participants à sentir que leur travail est utile et productif et les conduit à des expériences et à des conclusions valables et intéressantes.

Superviser les discussions

La discussion est l'un des éléments centraux du processus pédagogique. Après chaque activité, vous devez prendre du temps, même peu, pour conclure par un compte rendu et une évaluation ; nous avons joint quelques notes qui vous aideront à mener le débat. Vous devrez faire tout particulièrement attention à ce que chacun, au sein du groupe, puisse participer s'il le désire. Par exemple :

• En créant une bonne ambiance de travail qui permette à chacun de s'exprimer librement et d'être écouté. Il faudra laisser aux personnes le temps de faire connaissance et de se faire confiance, ainsi qu'organiser un environnement physique confortable pour tous.

• En invitant les participants à présenter leurs opinions ou à relater leurs expériences à propos des thèmes à l'étude.

• En employant des mots, des expressions et un langage commun à tous les membres du groupe, en faisant référence à des cas ou des faits intervenus récemment dans l'environnement des participants. En faisant le rapprochement direct avec leur propre vie.

Gérer les conflits

Il est possible que certains conflits surgissent durant les activités. Il faut s'y attendre. Nous demandons en effet aux membres du groupe d'explorer des questions très délicates et controversées, nous les encourageons à exprimer leurs opinions et à réfléchir en faisant preuve de sens critique ; tout cela fait partie du processus d'éducation interculturelle, mais cela n'est jamais facile et peut être extrêmement stressant.

Les situations susceptibles de déboucher sur des conflits perturbant le processus pédagogique doivent être évitées autant que se peut. Par conséquent, en tant qu'animateur, vous devez :

• Être attentif à chaque personne et à toute émotion forte déclenchée par une activité particulière ou par un aspect particulier d'un jeu de rôle ou d'une simulation.

• Vous assurer que chacun sait qu'il ne fait à aucun moment l'objet d'aucune pression pour en dire davantage ou révéler quelque chose de personnel contre sa volonté.

• Donner aux participants le temps de s'échauffer avant chaque activité, mais aussi le temps d'entrer dans leur rôle et, à la fin, d'en sortir.

• Consacrer suffisamment de temps au compte rendu et à la discussion.

Cependant, vous devez être préparé aux conflits susceptibles de se développer entre les participants, car nous abordons des questions qui touchent à nos propres sentiments, valeurs et expériences. Ne paniquez pas ! En abordant de telles questions, il est inévitable d'être émotionnellement impliqué. Les conflits ne sont pas nécessairement négatifs, à condition que vous gardiez le contrôle de la situation. Voici quelques conseils pour vous aider à les résoudre de manière positive, sans renforcer les tensions existantes ou paralyser le travail :

• Prenez suffisamment de temps pour procéder au compte rendu et discuter. Si nécessaire, consacrez-y davantage de temps que prévu.

• Aidez les personnes à clarifier leurs positions, leurs opinions et leurs centres d'intérêt.

• Soulagez les tensions au sein du groupe, par exemple en demandant à chacun de s'asseoir ou de discuter pendant 3 minutes en sous-groupes, dites quelque chose pour mettre la situation en perspective, etc.

• Encouragez chacun à écouter activement les autres.

• Mettez l'accent sur ce qui unit les personnes plutôt que sur ce qui les sépare.

• Recherchez le consensus. Encouragez les participants à s'intéresser à leurs points communs, plutôt qu'à tenter de faire des compromis et à renoncer à leurs positions.

• Recherchez des solutions pour résoudre le problème sans «recréer» de conflit.

• Proposez de parler en privé à un autre moment aux personnes concernées.

Si des conflits plus graves et plus profonds surgissent, qu'ils génèrent des tensions et paralysent le travail du groupe, il peut alors être préférable de remettre à plus tard la recherche d'une solution et d'attendre une meilleure opportunité pour résoudre le problème. Ce choix peut s'avérer non seulement nécessaire mais aussi positif. En remettant à plus tard la résolution du conflit, vous laissez aux personnes concernées le temps de réfléchir et de proposer de nouvelles approches ou solutions. Cependant, il faut souligner que, dans tous les cas, le conflit ne doit jamais être ignoré, masqué ou refusé. Se cacher la réalité, comme l'autruche, est inutile et constitue souvent l'attitude la plus négative.

Évaluation ou critique

Souvent, nous ne réfléchissons pas de manière critique à nos expériences et sommes simplement conscients de nous sentir bien ou mal par rapport à ce qui vient de se passer. Cependant, l'évaluation ou la critique sont des aspects essentiels du processus d'apprentissage et nous vous suggérons fortement de passer du temps avec le groupe, à la fin de chaque activité, pour parler de ce que chacun des participants a appris et de la relation entre cette expérience et leur propre vie, leur communauté et le reste du monde.

Nous vous suggérons de procéder en posant aux participants les questions suivantes :

• Que s'est-il passé durant l'activité et qu'ont-ils ressenti ?

• Qu'ont-ils appris à propos d'eux-mêmes ? et,

• Qu'ont-ils appris à propos des problèmes traités dans le cadre de l'activité ? et enfin,

• Comment peuvent-ils donner suite à cette activité et mettre à profit ce qu'ils ont appris ?

La critique dans un groupe ne doit pas forcément faire appel à la discussion. Vous pouvez recourir à d'autres techniques, dont le langage corporel, le dessin, la sculpture, etc. La section «Ressources utiles» donne des références d'ouvrages traitant de ces diverses techniques.

Nous vous suggérons également, après chaque session, de prendre le temps de passer en revue ce qui s'est passé. Notez brièvement :

• La façon dont l'activité s'est déroulée, de votre point de vue : préparation, objectifs atteints, etc.

• Ce que les participants ont appris.

• Quels sont les résultats, ce que les participants feront suite à cette activité.

Le processus d'évaluation et de critique ne prend pas fin ici ! Le feed-back constitue l'un des objectifs essentiels du développement de ce kit sous sa forme actuelle. Mais le travail n'est pas terminé, car ce projet sera révisé à la fin de la campagne et nous serions heureux de recevoir vos commentaires à propos de vos expériences relatives à son utilisation. Veuillez donc prendre le temps de remplir le questionnaire d'évaluation du kit que vous trouverez page 218 et de nous le renvoyer.

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