Le racisme est un problème très répandu encore de nos jours. Les gens se sentent obligés de critiquer les autres par rapport à leur couleur de peau, leur religion, leurs convictions politiques ou sexuelles.

J'estime que de tels comportement sont inacceptables et même révoltants. Je veux simplement dire que chacun d'entre nous devrait d'abord commencer par se regarder avant de critiquer les autres.

Miranda Maratheftou,
18 ans, Chypre

Pour moi, le racisme est une grave maladie, et je crois que tous tes pays devraient coopérer
pour y trouver un remède. Je pense que chaque être humain et chaque pays devraient avoir ce même sentiment.

Dia, 17 ans, Chypre

Section 5

Exemples de «bonnes pratiques»

Pendant la phase préparatoire de DOmino, un questionnaire a été envoyé aux organisations de jeunesse, aux services de jeunesse et aux initiatives de jeunesse, leur demandant de décrire des projets innovateurs d'éducation par groupes de pairs. Nous voudrions remercier tous ceux qui ont bien voulu apporter leurs contributions et regrettons de n'avoir pu en inclure qu'une petite sélection.

Dans ce qui suit, vous trouverez cinq descriptions de projet illustrant différentes approches de l'éducation par groupes de pairs en tant que moyen de lutte contre l'intolérance et la violence. Ces projets reflètent les diverses approches décrites dans la Section 2 de DOmino, c'est-à-dire des projets initiés dans des cadres formels et informels et des initiatives menées par des pairs ou par «la base». Les adresses indiquées à la fin de chaque description de projet vous aideront dans votre recherche d'informations complémentaires.

5.1 Projet pacificateur à Offenbach/Allemagne Un exemple de médiation par groupes de pairs dans les écoles

Un pacificateur est quelqu'un qui intervient pour aider à mettre fin à une querelle. Dans beaucoup de cultures, et notamment les plus anciennes, ces personnes bénéficient d'une très haute considération ; elles portent des noms différents, mais toutes ont un même rôle qui consiste à résoudre des problèmes sans violence ni blessure. De telles traditions humaines sont importantes dans nos sociétés modernes, dans lesquelles les problèmes sont plus compliqués et les conflits plus confus que jamais.

Nous avons par conséquent repris ce modèle traditionnel pour un projet sur la résolution des conflits dans les écoles d'Offenbach, en Allemagne. Le projet est mené par le Service local de la Jeunesse et de l'Éducation, dépendant du Service national de la Jeunesse, qui organise des manifestations éducatives pour coordonner les activités des différentes institutions travaillant avec des enfants et des jeunes dans notre ville.

Le projet de pacificateur fait partie d'un projet pilote de grande envergure consacré à la «prévention de la violence», et a été développé à partir de deux approches théoriques : l'éducation par groupes de pairs et la médiation. Ce projet a également bénéficié de subventions de la part du Comité Européen d'Organisation de la Campagne Européenne de la Jeunesse.

La signification de l'éducation par groupes de pairs dans les cadres pédagogiques formels et informels pour des projets hors programme scolaire

L'éducation par groupe de pairs à l'école possède une longue histoire. L'idée qui consiste à favoriser les relations entre élèves dans les contextes scolaires formels est exploitée par les enseignants depuis des siècles. Certains auteurs ont réussi à établir que l'éducation par groupes de pairs remontait à la Grèce ancienne et aux Romains, d'autres au Moyen-Âge seulement. Ce n'est pourtant qu'à la fin du 18ème siècle et au début du 19ème que cette forme d'éducation a commencé à être utilisée sur une grande échelle en Grande-Bretagne et en Amérique. Dans les autres pays européens, son emploi était encore limité.

Avec l'industrialisation, la connaissance de la lecture et de l'écriture est devenue indispensable, même pour les pauvres, mais il n'y avait ni enseignant, ni école pour répondre à ces besoins. C'est dans ce contexte que des approches pédagogiques, comme le système de Madras de Andrew Bell et le système d'enseignement mutuel de Joseph Lancaster, ont été mises en pratique. Selon ces systèmes, les enseignants formaient quelques élèves (tuteurs) qui étaient ensuite chargés de transmettre leurs connaissances aux autres enfants. Cette méthode faisait appel à l'enseignement par groupes de pairs de manière très formelle et généralement très autoritaire, mais, en réalité, son efficacité était réelle.

Cependant, au 19ème siècle, tandis que se développait le système éducatif du monde occidental, l'enseignement mutuel apparaissait de moins en moins adapté. Les méthodes d'éducation par groupes de pairs n'étaient plus appliquées que dans les petites écoles à classe unique. Dans le monde en voie de développement, et notamment l'Amérique Latine, ces méthodes continuaient à être appréciées pour l'enseignement de la lecture et de l'écriture. C'est la raison pour laquelle l'éducation par groupes de pairs a longtemps été considérée comme une méthode bon marché pour enseigner les notions de lecture et d'écriture de base.

Dans les discussions pédagogiques, pourtant, on ne parlait pas des bénéfices de l'éducation par groupes de pairs, bénéfices que nous identifions aujourd'hui clairement dans le système scolaire moderne : les enfants qui ne répondent pas bien aux adultes apprennent souvent mieux avec des tuteurs pairs ; et les tuteurs eux-mêmes en bénéficient, en développant des compétences en matière d'enseignement. L'idée qui consiste pour les étudiants à apprendre en s'entraidant constitue une alternative positive au système traditionnel d'apprentissage basé sur la compétition.

Durant les vingt dernières années, les bénéfices de l'éducation par groupes de pairs ont été redécouverts dans le débat pédagogique, notamment en Grande-Bretagne et aux USA. Aujourd'hui, dans nos systèmes d'éducation développés en Europe, nous ne manquons ni d'écoles, ni de professeurs pour enseigner les connaissances de base, mais hors du domaine de «l'apprentissage factuel», les méthodes formelles s'avèrent rarement efficaces. Les discussions ouvertes entre les jeunes à propos de la violence, de l'intolérance et de l'abus de drogues se multiplient. C'est précisément dans ce contexte que l'éducation par groupes de pairs peut venir compléter utilement l'éducation formelle et contribuer de manière significative à l'humanisation de la scolarité.

La nécessité, pour les enfants et les jeunes, de résoudre les conflits de manière constructive, et le processus de médiation

Pour beaucoup de jeunes, la violence est le moyen le plus efficace pour résoudre leurs problèmes. Ils ne tirent aucun plaisir de cette violence, mais ne voient pas d'autres solutions. Ils apprennent des adultes que l'on peut éliminer ses concurrents pour assurer son propre succès. Ils regardent des films qui leur montrent que la violence est la seule façon d'obtenir quelque chose dans ce monde, et ils ne veulent pas passer pour des faibles au sein de leur groupe de pairs.

Nous avons tendance à penser que les enfants et les jeunes peuvent apprendre la non-violence et qu'ils sont capables de résoudre beaucoup de problèmes par eux-mêmes. Cependant, il est évident que nos aptitudes à gérer les conflits de manière constructive ont été dépassées par les développements techniques et sociaux de nos sociétés. Il est par conséquent nécessaire de briser ce cercle de la violence et de contrer la violence des jeunes. Il existe divers modèles permettant de gérer les conflits de manière démocratique et non-violente.

L'une de ces approches non-violentes est la «médiation», qui consiste à résoudre un conflit par le biais d'une tierce personne. Cette dernière peut aider deux parties en conflit à trouver une solution qui convienne aux deux et à développer une situation qui leur soit mutuellement bénéfique. Le médiateur guide les opposants à travers un processus par étape, afin de les aider à clarifier les problèmes et de les motiver à trouver une solution acceptable.

La méthode de la médiation a été développée aux États-Unis et est utilisée depuis 20 ans dans divers domaines : querelles de voisinage, conflits maritaux et, s'agissant des jeunes, indemnisations des victimes en matière de droit pénal. La condition primordiale - mais aussi la principale restriction - réside dans la volonté de l'ensemble des personnes concernées de prendre part à la discussion et de rechercher une solution. Le médiateur peut aider les deux parties à trouver des solutions, mais il ne peut résoudre leurs problèmes à leur place.

La structure du projet de «prévention de la violence» à Offenbach

En juin 1993, le Conseil municipal d'Offenbach a demandé au Service de la Jeunesse de développer un programme contre la violence, le racisme, l'antisémitisme et l'extrémisme de droite. En toile de fond, il y avait la montée du racisme en Allemagne dans les années 90 et le succès remporté aux élections locales par le parti d'extrême droite, les «Républicains». Aux dernières élections locales, ce parti avait obtenu 15% des voix à Offenbach, et plus de 30% dans certaines circonscriptions. Le Conseil municipal a alors reconnu le danger potentiel de cette situation, compte tenu du fait qu'Offenbach possède le pourcentage de migrants le plus élevé d'Allemagne. Un tiers des résidents d'Offenbach ne possèdent pas de passeport allemand.

Le Service éducatif de la Jeunesse a commencé à travailler sur un projet pilote, accepté l'année dernière, qui fonctionne à présent. Les principaux objectifs de ce projet sont les suivants :

a) La mise en application, dans les écoles et les institutions de jeunesse d'Offenbach, d'un système pour la résolution constructive des problèmes.

Cela exige l'intervention de trois méthodes de travail :

• Dresser les "profils des conflits" dans les classes ou les groupes de jeunes, dans les écoles, les jardins d'enfants et les centres de jeunes, afin de mettre en lumière la nature des problèmes et des conflits qui se posent ;

• développer des programmes pour les enfants et les jeunes, afin qu'ils puissent gérer les conflits de manière constructive. Le principal programme de ce type est le «programme pacificateur» qui prévoit la médiation en cas de conflits et la formation à la résolution constructive des conflits ;

• former les enseignants et les travailleurs sociaux aux méthodes de résolution pacifique des conflits. Grâce à cette formation point par point, les enseignants apprennent les méthodes pour conseiller les enfants et les jeunes qui ont des problèmes.

b) La construction d'une infrastructure pour l'éducation à la tolérance et aux droits de l'homme.

c) La création d'un réseau local et d'un service d'information pour les écoles et les centres de jeunes.

Le projet pacificateur pour la médiation des conflits entre les élèves

A la base de ce projet, on trouve les expériences d'éducation par groupes de pairs. Cela implique le transfert de la médiation dans le processus pédagogique et la confiance dans l'aptitude des enfants à résoudre leurs propres problèmes.

Un processus de médiation par les pairs se déroule plus ou moins de la façon suivante :

Deux élèves se disputent. Cette dispute n'est pas forcément synonyme de violence, mais de tristesse et de larmes. Tous deux décident (ils doivent être à l'origine de cette décision) de faire appel à un médiateur. Les quatre élèves - les deux parties en litige et les deux médiateurs - vont suivre un processus point par point dans lequel les médiateurs vont écouter les deux élèves en conflit, identifier leurs sentiments et leurs besoins, puis convenir d'une ligne de conduite. Le point culminant de ce processus arrive avec la signature d'un bref contrat entre les deux parties en litige et une poignée de main.

Ce scénario décrit un processus de médiation mis en oeuvre dans une classe ou une école, avec l'aide des professeurs. Dans les trois prochaines années, nous espérons parvenir à instaurer les conditions nécessaires à la mise en pratique d'un tel processus.

Dans un premier temps, nous avons développé un programme de formation pour les élèves et les professeurs. A l'occasion de ce processus, nous nous sommes rendus compte que tous les élèves n'étaient pas en mesure de faire office de médiateurs, soit parce qu'ils n'étaient pas intéressés, soit parce qu'ils ne bénéficiaient pas de suffisamment de considération au sein de leur groupe.

Nous avons par conséquent développé deux variantes de programme de formation.

Premièrement, nous avons formé un groupe de délégués de différentes classes (10-12 ans) à l'occasion d'un stage de deux jours et de trois après-midi de trois heures consacrés à la médiation des conflits. Suite à cette formation, nous les avons présentés à leurs classes en tant que médiateurs.

Deuxièmement, nous avons travaillé avec une classe entière dans le cadre d'un second stage de cinq unités de trois heures, puis avons procédé à l'élection des médiateurs. Avec les élèves choisis, nous avons entrepris un programme de formation séparé. Les élèves arrivés en fin de stage ont reçu un certificat, ou une «carte de pacificateur». Dans ce processus, nous avons constaté qu'il est essentiel que les enseignants aident les médiateurs dans leurs classes et que les autres enseignants et les parents acceptent les médiateurs. Actuellement se déroulent des stages de formation pour les enseignants qui aident ces élèves et des réunions d'information pour les parents. Grâce à ces activités s'est développée une atmosphère constructive au sein de la «Schiller-Schule», un grand lycée dans lequel le projet a été expérimenté pour la première fois.

Dans un deuxième temps, nous avons mis en place le programme de formation développé dans les autres classes, et commencé à appliquer le programme pacificateur en suivant les étapes ci-dessous :

• Nous organisons un stage de formation pour les professeurs de six classes. Les professeurs apprennent les exercices de base pour la résolution des problèmes de manière constructive et les règles fondamentales de la médiation.

• Ces professeurs se chargent des premières étapes de la formation des élèves jusqu'à l'élection des médiateurs qui permet de choisir environ six élèves dans chacune des six classes. Cette phase est appelée «phase d'exploitation».

• Puis, avec les élèves choisis dans ces six classes, nous formons deux groupes qui vont suivre le stage de formation à la médiation. Ces stages sont assurés par des formateurs qualifiés, sans les enseignants.

• Lorsque les médiateurs formés sont présentés à leurs classes, nous surveillons leurs activités et organisons des réunions régulières à leur intention.

• Parallèlement, nous organisons diverses réunions et activités visant à encourager la discussion entre les écoles à propos de ces projets. Parmi ces activités, nous avons proposé un concours doté d'un prix et organisé des représentations théâtrales dans la cour des écoles, ainsi que diverses autres manifestations.

Le projet a été lancé en octobre 1994. Les premières expériences sont très encourageantes et nous sommes souvent étonnés de la rapidité avec laquelle les enfants ont trouvé de nouvelles solutions aux conflits.

Pour de plus amples informations, veuillez contacter :

Jugendbildungswerk des Jugendamtes der Stadt Offenbach

Landgrafenstrasse 5, 63071 Offenbach, Germany

Tel.: 069/85000911, Fax: 069/85000946

Email: jugendbildungswerk@jugendamt-of.de

Site web en allemand :
http://www.offenbach.de/Themen/Leben_in_Offenbach/Kinder_Jugend_&_Familie/
Jugend/Jugendbildung/Jugendbildungswerk

(consulté en décembre 2003)

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